Doctorat

Docteure : Fleur Lorton

Titre : Epidémiologie des infections bactériennes sévères communautaires de l’enfant

Encadrants : Martin Chalumeau, Elise Launay

Ecole doctorale : ED 393 Epidémiologie et Sciences de l’Information Biomédicale, Université de Paris

Date de soutenance : 11/2020

Jury : Corinne Alberti, Pierre Tattevin, Jean-Claude Desenclos, Jean-Ralph Zahar

Résumé :

Les infections bactériennes sévères (IBS) restent une cause importante de morbidité et de mortalité chez l’enfant alors qu’une partie de cette morbi-mortalité pourrait être théoriquement évitée par la vaccination et par une prise en charge parentale et médicale optimale. L’objectif principal de ce travail doctoral était d’apporter des connaissances nouvelles sur l’épidémiologie des IBS communautaires de l’enfant et notamment sur : i) les agents pathogènes responsables et leur évolution à 10 ans d’intervalle ; ii) l’évitabilité potentielle par la vaccination des décès et des séquelles liés aux IBS ; et iii) la qualité des soins reçus dans la prise en charge initiale des IBS chez l’enfant. Les données utilisées étaient issues d’une enquête confidentielle en population avec experts indépendants menée dans la région du Grand-Ouest en France entre 2009 et 2014 sur un territoire représentant 15% de la population pédiatrique française. Tous les enfants âgés de 1 mois à 16 ans hospitalisés dans un service de réanimation pédiatrique pour IBS communautaire ou décédés avant l’admission dans les suites d’une IBS ont été inclus. Nous avons d’abord montré que l’incidence (comparative morbidity figure=0,47 ; IC95% : 0,37-0,59) et la mortalité (comparative mortality figure=0,27 ; IC95% : 0,14-0,46) des IBS communautaires avaient diminué en France depuis 10 ans, sauf pour celles à Staphylococcus aureus, très probablement en lien avec la généralisation des vaccins conjugués méningococcique C et pneumococcique. Les enfants les plus jeunes restaient cependant exposés à un risque plus élevé d’IBS, de séquelles et de décès. Au contraire de ce qui était observé dans les pays européens voisins, les bactéries à prévention vaccinale continuaient de compter pour la majorité des infections. Ce résultat renforce l’urgence d’améliorer la couverture vaccinale pour ces valences. Nous avons alors montré que 25% (IC95% : 9-49) des décès et 25% (IC95% : 0-54) des cas de séquelles graves liés aux IBS à Neisseria meningitidis ou à Streptococcus pneumoniae étaient théoriquement évitables par une application correcte des recommandations vaccinales en vigueur au moment de l’infection. Dans un contexte de forte hésitation vaccinale, ces résultats, en identifiant les conséquences cliniques d’un défaut vaccinal, pourraient contribuer à améliorer l’opinion du public quant à l’impact positif des vaccins sur la santé des enfants et aider ainsi les médecins dans la mise en œuvre de la nouvelle politique vaccinale nationale. Nous avons enfin montré que la prise en charge globale des enfants atteints d’IBS avant l’admission en réanimation était jugée suboptimale de façon certaine dans 34,4% (IC95% : 28,6-40,5) des cas. Une prise en charge suboptimale était plus fréquente chez les enfants avec des séquelles (odds ratio ajusté –ORa=5,61 ; IC95% : 1,19-26,36) et moins fréquente chez ceux décédés (ORa=0,16 ; IC95% : 0,04-0,65) en comparaison aux enfants survivants sans séquelles. Cette association paradoxale entre suboptimalité et diminution du risque de décès pourrait être expliquée par un ajustement insuffisant sur la gravité intrinsèque de l’IBS liée à la virulence bactérienne et/ou à la susceptibilité génétique de l’hôte. Enfin, nous avons montré que la prise en charge médicale pourrait probablement être optimisée par la réduction des inégalités territoriales d’accès aux soins et par l’amélioration de la qualité des soins primaires notamment chez le jeune enfant. L’ensemble de ces travaux a permis : i) de mettre en évidence la nécessité d’une surveillance épidémiologique nationale des bactéries responsables des IBS communautaires pour adapter les pratiques en matière d’antibiothérapie probabiliste et la politique vaccinale nationale ; ii) d’évaluer les conséquences d’un défaut vaccinal et proposer des arguments pour lutter contre l’hésitation vaccinale ; et iii) d’identifier des cibles d’actions prioritaires pour une meilleure prise en charge des IBS communautaires.

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