Contexte
Bien que la mort maternelle soit devenue un évènement très rare dans les pays à ressources élevées, le ratio de mortalité maternelle constitue toujours dans ces pays un important indicateur de santé maternelle et un indicateur de la performance du système de soins.
Devant les limites des statistiques de mortalité maternelle issues du certificat de décès (sous-estimation, profil biaisé) un système « ad hoc » pour l’étude de la mortalité maternelle apparait indispensable.
Depuis 1996, l’Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM) est réalisée en France en continu. La responsabilité scientifique de cette enquête permanente a été confiée initialement à l’unité Inserm 149 devenue 953 et actuellement 1153 – Equipe EPOPé.
A ce jour, l’ENCMM a enregistré 1800 décès maternels dans tout le territoire français.
Objectifs
L’ENCMM étudie l’ensemble de décès maternels en France avec un double objectif :
- la caractérisation épidémiologique de la mortalité maternelle et de son évolution –niveau, facteurs de risque, profil de causes-, selon une approche quantitative.
- l’analyse des circonstances de survenue et de la prise en charge de l’évènement morbide et de l’issue fatale, afin d’identifier des axes d’amélioration, selon une approche principalement qualitative.
C’est le rôle du comité national d’experts sur la mortalité maternelle (CNEMM) qui a reçu mission d’analyser l’ensemble des morts maternelles au niveau national, en vue d’identifier des axes d’amélioration. Ce Comité est constitué de gynécologues-obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs, sages-femmes, un spécialiste en médecine interne et épidémiologistes, et a été placé depuis 2014 sous la tutelle de l’Institut de Veille Sanitaire (InVS), devenu l’agence nationale de santé publique en 2016 (SPF). Un expert psychiatre est associé à l’analyse des décès dans un contexte psychiatrique ou de suicides. Un médecin légiste est associé pour l’analyse des autopsies et autres examens post-mortem.
Méthode
Pour assurer le recueil des données de l’étude de manière exhaustive et confidentielle, l’ENCMM a mis au point la procédure suivante en 3 étapes, agréée par la Commission Nationale sur l’Informatique et les Libertés (décision DR-2018-157) :
- Etape 1 : Identification des décès « associés à la grossesse »
Tous les décès survenus pendant la grossesse ou jusqu’à 1 an suivant sa fin, quels que soient la cause et le mode de terminaison sont inclus. Quatre sources d’identification sont utilisées :
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- l’ensemble des Réseaux de santé périnatale participent à un signalement direct en cas de survenue d’un décès possiblement maternel dans un établissement de leur territoire. Depuis Novembre 2022, via le certificat électronique de décès, la coordination de l’ENCMM est avertie en direct en cas de certification d’un décès dans un contexte de grossesse ou accouchement (questions spécifiques dans le certificat) ;
- les certificats de décès, avec la participation du centre d’épidémiologie des causes médicales de décès (CépiDc) ;
- la base nationale des bulletins de naissances et de décès de l’INSEE permet d’identifier les femmes décédées dans l’année suivant une naissance ;
- la base nationale du PMSI (Programme de Médicalisation du Système d’Information) permet d’identifier les décès hospitaliers de femmes dans un contexte obstétrical.
- Etape 2 : Documentation des décès
Après l’obtention de l’accord de participation du médecin concerné par le cas, l’équipe EPOPé avise un binôme d’assesseurs, qui sera chargé de la collecte d’information (antécédents de la femme, déroulement de sa grossesse, circonstances de survenue de l’évènement ayant conduit au décès et prise en charge). Ce binôme est composé de cliniciens bénévoles et associe un obstétricien ou une sage-femme et un anesthésiste-réanimateur ou un psychiatre ou pédopsychiatre (selon le contexte). Les dossiers sont centralisés par l’équipe EPOPé et anonymisés avant consultation par le comité d’experts.
- Etape 3 : Revue et classement des décès
C’est la mission spécifique du CNEMM. En réunions plénières, chaque cas de décès qui a fait l’objet d’une enquête est discuté collégialement, à partir de l’ensemble des informations disponibles. A l’issue de la discussion collégiale, le comité porte un jugement consensuel sur :
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- la cause du décès,
- le caractère « maternel » (lien causal avec la grossesse) ou non (lien temporel mais non causal) du décès.
Et s’il s’agit d’une mort maternelle : - l’adéquation des soins prodigués : les soins sont classés optimaux ou non optimaux
- le caractère évitable du décès, comme « non évitable », « possiblement évitable », ou « probablement évitable », selon l’existence de circonstances dont la correction aurait pu éviter l’issue fatale.
Production
Les résultats de cette enquête font l’objet de rapports triennaux, et d’articles dans des revues scientifiques.
Ils contribuent nationalement aux indicateurs de santé publique dans le « Rapport sur l’état de santé de la population ». Internationalement, ils contribuent aux rapports mondiaux de l’OMS sur la mortalité maternelle.
Contacts
- Catherine Deneux-Tharaux (catherine.deneux-tharaux@inserm.fr), Médecin, Directrice de recherche Inserm, Responsable scientifique de l’ENCMM
- Monica Saucedo (monica.saucedo@inserm.fr), Médecin épidémiologiste IR Inserm
- Aude Almeras, Sage-femme, Coordinatrice nationale de l’ENCMM
- Email général : encmm@inserm.fr
Pour plus d’informations
6e rapport de l’Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM), 2013-2015
Document de synthèse ENCMM, 2013-2015
Morts maternelles en France : Les données clés de l’enquête 2013-2015
Les principales causes de décès en fonction du stade de grossesse, 2013-2015
Les derniers rapports publiés :
5e rapport de l’Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM), 2010-2012
Les morts maternelles en France 2007-2009 : Mieux comprendre pour mieux prévenir
Rapport du Comité national d’experts sur la mortalité maternelle 2001-2006